vendredi 11 janvier 2008

"La cité des Roses" de Mouloud Feraoun

Mouloud FERAOUN
La Cité Des Roses



I – Critique Littéraire
1 – L’auteur
Mouloud Feraoun est né le 8 Mars 1913 , dans un village du Djurdjura de 2000 habitants .
Son nom est Aït-Chabane, Feraoun étant le nom attribué par l'état-civil français.
Entré à l’école primaire de Tizi Hibel dès 7 ans , il obtint une bourse à l’E.P.S (collège) de Tizi Ouzou où il prépara le concours d’entrée à l’Ecole Normale d’instituteur de Bouzaréah.
Instituteur en 1935 , il obtint sa première direction d’école à Taourirt Moussa en 1945 .
Lorsqu’en 1952 , il dut exercer à Fort National afin de pouvoir scolariser des enfants qui allaient entrer au collège , il vécut cela comme un exil . Mais le véritable déracinement pour lui , fut sa nomination à Alger .
En 1953 , il reçoit le Prix du roman populiste pour son roman "La terre et le sang".
Il resta trois années à l’Ecole de la Cité Nador où il prit la direction en Octobre 1957 .
C’est en Octobre 1960 que Mouloud Feraoun rejoignit les Centres Sociaux Educatifs qui avaient pour mission de mettre en place un projet destiné aux populations les plus défavorisées d’Algérie ( cours d’alphabétisation , d’agriculture , d’hygiène , de santé , etc..)
C’est la , alors qu’il participait à une séance de travail , qu’il fut assassiné le 15 mars 1962 avec cinq de ses compagnons ( deux musulmans et trois européens ) par un commando de l’OAS qui les cribla de balles .


2-Fiche de lecture
"La Cité des Roses" a été achevé fin 1958 . Puis reprit en 1962 . Les premiers chapitres ont été publiés en 1972 dans le recueil "L’anniversaire" . 49 ans plus tard , il est édité dans son intégralité à titre posthume . Ce roman est bâti autour d’évènements et de faits réels vécus par l’entourage de l’auteur et dont il s’est inspiré .
La Cité des Roses est une histoire d’amour entre un Algérien et une Française dans un contexte de crise radicale du système colonial . Sans insister sur la situation historique , qui apparaît de toute façon dans les rapports quotidiens entre les personnages et se manifeste par des scènes de jalousie , d’hypocrisie et de colère ; Mouloud Feraoun fait naître et s’épanouir un sentiment d’amour au milieu de la haine.
Mais cet amour étouffé et brillant entre une institutrice nouvellement arrivée de France et un directeur d’école algérien , tous deux mariés par ailleurs qui veut exprimer le besoin de liberté qui éprouvent l’un et l’autre camp , se terminera finalement par une rupture .
La manière dont cette passion est racontée et aboutit nous éclaire sur les relations qui existait entre les indigènes algériens , les colons Français (de France) et les colons Française (d’Algérie) , dans le contexte difficile des dernières années de la guerre d’Algérie . De plus la rupture de couple fait penser à la fin de la colonisation Française en Algérie.


3-Le ressenti sur le livre

a) Commentaires de Benamara Aziz
Ce qui m’a le plus plu dans ce livre c’est de voir qu’il peut naitre un sentiment d’amour aussi fort dans une période aussi trouble où domine la haine , la souffrance et la mort . Je suis interpellé par le fait que Mouloud Feraoun arrive encore à mettre des qualités humaines dans ses personnages ( confiance , don de soi ) alors que leur comportement quotidiens les obligent à tout le contraire ( méfiance , hypocrisie , haine) . Comme quoi , même dans les situations les plus dramatiques , l’espoir existe encore …

b) Commentaires de Bourkaïb Manyl
J’ai beaucoup apprécié le style de Feraoun dans ce livre . Je trouve qu’il diffère du style du "Fils du Pauvre" mais c’est tout de même original . En ce qui concerne l’histoire , je pense que ce n’est pas vraiment vraisemblable . Je n’imagine pas deux personnes mariés s’aimer entre eux dans un tel contexte . Mais , c’est peut être cela qui fait la magie de l’histoire…



II - Le Contexte Historique
1 -L’école
L’école s’est implanté en Algérie en plusieurs phases et de façon très inégale .
Dans les années 1870 , Alger devient un département Française . Dès lors , les colons se rendant compte que les indigènes ne sont pas assez civilisés par rapport aux européen mettent en place un politique d’assimilation . Le but de cette politique est de civiliser et franciser les indigènes . Plusieurs instituteurs français viennent en Algérie pour instruire les indigènes . L’école touchait plus les villes que les campagnes et était fréquentée plutôt par les garçons que par les filles . En effet , plusieurs familles indigènes , très conservatrices , refusent d’envoyer leurs filles à l’école) .Un faible nombre de filles vont à l’école et en sont retirées dès l’âge de 10ans .
A l’école , les indigènes apprennent la langue française , la culture française et l’histoire de la France . Les instituteurs ont parfois recours à la propagande afin que les indigènes soient incités à penser qu’ils sont Français .Les chiffres ne sont pourtant pas satisfaisants : 10% des indigènes vont à l’école primaire , 8 % en secondaire et 4% font des études supérieures .
C’est à partir des années 1950 que les indigènes se rendent compte que l’instruction pemet de s’en sortir socialement . C’est alors que plusieurs écoles sont construites . Au début , ce sont des écoles d’une classe dans laquelle l’instituteur s’occupe en même temps d’élèves de niveaux différents .
Même s’il existe une politique de scolarisation , les inégalités demeurent entre les européens et les musulmans , les zones rurales et les zones urbaines , les garçons et les filles et enfin selon les différentes classe sociales . Cela , tant du point de vue de la scolarisation dans le primaire et du choix de la filière d’enseignement .


2 – Relations entre Français et Algériens
Les relations entre Algériens et Français ressemblaient à des relations amicales .
« Etant enfant , je me souviens que nous avions beaucoup d’amis , avec lesquels nous sommes toujours restés en bons termes d’ailleurs . Parmi eux , il y avait des Français , des enfants d’Algériens mariés a des Françaises et des Algériens . Nous nous recevions mutuellement et nous organisions des sorties ensembles à la plage par exemple » , raconte Fazia , la fille de Mouloud Feraoun .
Cependant , si les uns et les autres vivaient en bonne entente , c’était le plus souvent cote à cote , chacun de son côté . Les Algériens qui avaient un statut inférieur continuaient de vivre eux . Les Français , pour la majorité d’entre eux ne cherchaient pas à voire ce qui se passait chez les Algériens . Ils les ignoraient et entretenaient des relations entre eux .
Cette ‘‘indifférence’’ était ressentie par la population algérienne . « Cela dit , les Français d’Algérie étaient persuadés en toute bonne foi , de leur supériorité et ils ne manquaient jamais une occasion de la faire valoir . Par exemple , lorsque nos amies essayaient gentiment de nous donner des conseils , ma mère n’acceptait pas ce paternalisme et elle les remettait directement à leur place » poursuit Fazia.
Dans "La Cité des Roses" , , Mouloud Feraoun dit bien que si les Français ont cherché à assimiler les populations algériennes en leur inculquant leurs principes , leurs valeurs et leurs savoir, ils n’ont eux-mêmes jamais cherché à s’assimiler à la population chez laquelle ils arrivaient .


3 – La guerre
Pendant les dernières années de la guerre d’Algérie , les relations entre Algériens et Français sont exacerbées . "La violence est là. Des scènes horribles se déroulent sous nos yeux et font partie du quotidien . On se méfie les uns des autres , on se surveille . Chacun dénonce tout le monde . On est tenu d’afficher son camp et de s’y maintenir . D’ailleurs , on n’en a pas besoin : on est Français ou Arabe » raconte Zedjiga , aînée des enfants Feraoun . « Et dans la vie de tous les jours , chacun veut se persuader qu’il participe à sa façon au conflit . Alors l’amitié s’en va et laisse place à la défiance et aux mesquineries » , poursuit Fazia .

Sources :

N.B : Nous avons réalisé ce travail à partir d’interviews . Nous avons interrogé trois des enfants de Mouloud Feraoun . Ils nous ont apporté des informations sur le livre , l’histoire , le contexte de la guerre et la vie entre français et algériens

- Mr FERAOUN Ali : Né à Tizi Hibel , le 14/09/1942 .
Conseiller du Ministre de l’agriculture
Ingénieur en Agronomie
Diplômé en Anthropologie Sociale et Culturelle université René Descartes
Président de la section Algérienne de l’Association des « Montagnes du Monde » et Président de l’association des anciens élèves de l’Institut National Agronomique

- Mme FERAOUN (ABTROUN) Zedjiga : Née à Tizi Hibel , le 31/07/1939
Docteur en Médecine
Ancienne directrice de l’école du Clos Salembier et du collège du Chemin de Gascogne (Alger)

- Mme FERAOUN (BELMILOUD) Fazia : Née à Taourirt Moussa , le 04/10/1950
Professeur à l’Université d’Alger
Docteur en Sociologie , diplômée de la Sorbonne sous la direction de Mr Pierre BOURDIEU .


-Cour d’Histoire/Géographie , Lycée International Alexandre Dumas , Alger
Professeur : Mme CARRIER

Aziz et Manil




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